Un manager de la tribu Yakafokon affirmait récemment, bravache, que si on savait gérer sa trésorerie on n’avait pas besoin de se compliquer la vie avec une règle de maintien des fonds propres associatifs à un niveau correspondant à 4 mois de charges de fonctionnement.
C’est à mon avis un erreur grossière car c’est un manque de prudence qui peut conduire facilement et sans qu’on y prenne garde à la cessation de paiements. En effet, aucune association n’est à l’abri d’un mauvais payeur.
Je me rappelle ce délégué régional de l’Agefiph qui par fantaisie, ne versait le financement annuel d’une association (spécialisée dans l’accompagnement des personnes handicapées vers l’emploi) qu’au 1er juillet de l’année en cours, compliquant singulièrement la gestion de la trésorerie puisqu’il fallait alors aller négocier avec le banquier et supporter des frais bancaires pour pouvoir payer les salaires. Heureusement pour cette association, ce délégué régional fut bientôt envoyé dans les oubliettes et remplacé par quelqu’un de plus avisé.
Tel autre super manager missionné pour redresser la barre d’une association en difficulté et qui n’hésitait pas à donner des leçons de trésorerie aux uns et aux autres, se contenta finalement d’en déposer le bilan après l’épuisement des fonds propres de la dite association.
Les fonds propres :
Ils sont composés des fonds dont dispose l’association sans les devoir à aucune autre entité. (1)
Ils lui permettent donc une marge de liberté d’action stratégique,
Cela, soit pour autofinancer des expérimentations d’actions nouvelles, soit pour investir sans emprunter dans des équipements nouveaux ou supplémentaires, soit pour convaincre le banquier que la situation financière est saine et que l’on pourra rembourser un éventuel emprunt que l’on entend lui demander.
Les PME et TPE françaises sont connues pour leur faiblesse en fonds propres. A croire qu’en France on aime bien prendre des risques et emprunter.
Mais pour les associations c’est encore pire. En effet si une société peut espérer disposer dès sa naissance d’un capital social qui constituera ses fonds propres Puis espérer que ceux ci s’accroissent au rythme des bénéfices non distribués, ce n’est pas le cas d’une association .
A sa naissance l’association ne dispose que des maigres cotisations des adhérents comme fonds propres.
Ce n’est que progressivement, si elle est bien gérée qu’elle pourra espérer réaliser des bénéfices et/ou obtenir des subventions. Cela lui permettra, au-delà du financement des activités, d’augmenter son actif net et d’accroître le montant de ses fonds propres (que certaines associations appellent pompeusement « fonds associatifs »)
Qu’apportent exactement les fonds propres associatifs ?
La sécurité apportée par les fonds propres
On conseille généralement de disposer dès que possible pour une association, de 4 à 6 mois de fonctionnement en fonds propres. Cela revient à dire que quoiqu’il arrive l’association pourra tenir 4 ou 6 mois sans recevoir de financement extérieur. Quel est l’avantage d’une telle marge d’autonomie ?
> Un confort de trésorerie
L’association peut ainsi faire face à des aléas liés à l’encaissement des recettes qui peuvent survenir à n’importe quelle occasion (outre l’exemple cité en introduction on peut évoquer les fameux fonds européens qui sont réputés pour leur versement tardif en France, chaque région étant chargée de leur versement après de multiple contrôles au caractère parfois capricieux. Faute de cela l’association devrait emprunter à sa banque à un taux pas toujours amical.
> Une capacité d’emprunt
Les banquiers préfèrent toujours être rassurés par l’existence de fonds propres pour accorder un prêt à un taux intéressant. Encore une manifestation de l’adage « on ne prête qu’aux riches ».
> Une capacité d’autofinancement d’investissement (1)
Une association a tout intérêt à être réactive et à proposer de nouvelles solutions à ses adhérents. Ce sont de nouveaux services ou de nouvelles formations. Ces nouvelles formules d’activité nécessitent d’être conçues et rodées avant d’être vendues et de rapporter du chiffre d’affaires. Elles sont donc risquées. L’association doit pour cela disposer de fonds de façon complètement autonome : les fonds propres.
Les fonds propres encore et toujours. On voit bien que ceux-ci loin d’être une source de gaspillage sont une condition sine qua non du bon fonctionnement d’une association dynamique.
A bon entendeur, salut !
(1) Voir aussi Management et économie des entreprises G. Bressy & C. Konkuyt Aide mémoire Sirey 12ième édition, 2018 / Ch 21. La fonction financière p477 et suivantes.