Les raisons de la défiance dans nos institutions sont de plus en plus nombreuses. Elles aboutissent à un sentiment général que les promesses de nos élites n’ont pas été tenues, ou pire ne sont jamais tenues. (Le fameux « Elles n’engagent que ceux qui les croient »). On peut sans doute trouver là une explication du taux d’abstention croissant lors des diverses élections prévues par notre constitution.
Une confiance réciproque est nécessaire à un management efficace. Cela est vrai dans l’entreprise comme dans toute organisation, y compris au niveau d’une collectivité. C’est également vrai en ce qui concerne la gouvernance d’un Etat et l’administration d’un pays.
Autant la confiance vient faciliter toutes les relations de coopération entre les humains autant la défiance agit au contraire comme un frein, un facteur perturbateur qui engendre une déperdition d’énergie conduisant à la sous productivité et l’inefficacité.
Une défiance envers nos institutions est observable en France (1)
A force de prendre les citoyens pour des gnous, nos élites ont récolté la défiance (2). On peut constater aujourd’hui une crise de confiance envers nos institutions politiques.
La mesure de cette défiance a été effectuée lors d’une étude de l’institut IPSOS en septembre 2024 auprès d’un échantillon représentatif de la population française à la suite de l’épisode électoral de juin et juillet 2024. En effet, 55 % des personnes interrogées par Ipsos se disent mécontentes (4 points de plus par rapport à 2023) du fonctionnement de notre démocratie et pour 74 % d’entre elles, ce fonctionnement s’est détérioré depuis cinq ans. De plus, 57 % estiment que « les politiques » privilégient riches et puissants. Néanmoins 71 % de l’échantillon trouvent que la commune représente bien leurs points de vue et leurs priorités et 54 % ont une appréciation positive de la collectivité régionale (conseil régional). Finalement 56 % des Français interrogés jugent nécessaire « un changement radical pour améliorer le système politique » tandis que seuls 38 % pensent qu’on peut « améliorer les choses par des réformes mesurées »
Les risques qui en résultent:
Cette défiance favorise une certaine « désobéissance généralisée » des citoyens.
Elle fait surtout le lit des extrémismes et ouvre la voie à tous les bateleurs de foire qui se présentent comme des êtres providentiels.
Hitler, Mussolini, Franco, Staline, Mao Zedong, la liste est longue des profiteurs de la détresse populaire qui est souvent née d’une crise de confiance.
On voit tout le mal qui peut en résulter et il est utile de se demander comment nos institutions ont pu perdre progressivement leur crédit vis à vis des citoyens.
Le jeu des bonimenteurs
Les raisons de la défiance actuelle liées au comportement de nos représentants,
Un comportement élitiste et antidémocratique de nos représentants élus et désignés a joué un grand rôle.
Celui-ci s’est manifesté clairement avec le fameux nuage radioactif de Tchernobyl où l’on a vu les pouvoirs publics nier l’évidence en prenant les citoyens pour des niais, faute d’être capable de proposer un protocole sanitaire adapté. Certains scandales comme celui du sang contaminé, puis d’autres comme la fraude fiscale clownesque du ministre du budget de François Hollande Jérôme Cahusac, ont contribué à décrédibiliser nos élus et gouvernants.
Au-delà de comportements individuels inacceptables, sous la présidence Sarkozy (mai 2007/mai2012), un nouvel événement est venu se graver dans la mémoire collective avec la grande manipulation anti-démocratique qui a suivi en 2005 la victoire du « non » au référendum sur le projet de constitution européenne défini par le traité de Lisbonne.(3) Pourtant nos dirigeants de l’époque, Jacques Chirac (mai 1995/ mai 2007) pour la présidence et Nicolas Sarkozy pour la direction de l’UMP, affirment que « l’Europe ne peut pas rester en panne ». Les citoyens des Pays Bas, à leur tour, voteront majoritairement « non » en juin 2005 par référendum.
Un tel désaveux par deux peuples souverains aurait du mettre radicalement fin au projet et appeler une prise en compte de ce rejet et des évolutions nécessaires. La manipulation qui a suivi a été une grande leçon de cynisme et de manœuvre de contournement de la règle démocratique.
Les grands perdants furent la crédibilité des institutions politiques françaises et de l’Union européenne, coupables aux yeux des citoyens de déni de démocratie. C’est ainsi qu’en février 2008, le gouvernement a présenté au Parlement réunissant les deux chambres à Versailles un projet de modification de quelques règles constitutionnelles puis a fait voter par l’Assemblée Nationale un traité modificatif européen, très peu différent sur le fond du texte initial, refusé en 2005 par référendum.
Les élites du pays et les représentants élus des citoyens ont sans doute perdu ce jour là une bonne partie de la confiance du peuple de France.
Une image saisissante du comportement décalé et inadapté de nos élus nous a été donné lors des cérémonies du 11 novembre 2024 lorsque le Président de la République, Emmanuel Macron, a publiquement salué, en lui serrant la main chaleureusement et en échangeant quelques bons mots, l’ancien Président Sarkozy condamné en appel à de la prison et déclaré inéligible en appel dans l’affaire « Bygmalion » (14 février 2023) puis également en appel, dans « l’affaire des écoutes » (17 mai 2023) alors que d’autres procédures sont en cours contre lui (comme l’affaire dite « du financement libyen »). Comme si les condamnations pénales, fussent elles suspendues par des pourvois en cassation, n’avaient aucune prise sur nos « grands » et que la justice ne concernait finalement que le petit peuple.
D’autant que la qualité des services publics s’est progressivement et sensiblement dégradée, comme si ceux ci n’avaient pas vraiment d’importance pour ceux qui ont les moyens de s’en passer . . . .
La crise de nos services publics
Le conformisme néo-libéral très répandu dans les institutions européennes et françaises a entrepris dans les années 2000 de mettre fin aux monopoles et de privatiser les « opérateurs ». Il faut rationaliser le management des services publics pour dépenser moins. Mais attention ! On prétend ne pas produire moins ni moins bien, c’est « une modernisation et une optimisation ». Un nouvel état d’esprit est insufflé dans ce sens auprès des élèves de l’ENA. On va « diriger par objectifs » les administrations publiques afin de leur donner l’ »efficacité du secteur privé ». Les cadres de la fonction publique doivent exercer de nouvelles responsabilités car l’efficacité passe par une décentralisation des pouvoirs qui doit permettre une plus grande adaptation aux besoins et une réactivité. (4)
De même des méthodes d’évaluation des politiques menées et des services publics produits ont été mises en place. Ces batteries d’indicateurs et ces dialogues de performance ont accaparé les cadres publics jusqu’à développer un nouveau « biais bureaucratique » en amenant les organisations publiques et parapubliques à chercher à atteindre des objectifs chiffrés toujours plus détaillés, avant de se préoccuper des besoins réels des usagers, de leur évolution et des nouvelles solutions à développer.
Arrêtons de couvrir un trop grand nombre des restrictions de moyens budgétaire par le concept de rationalisation ! Un personnel et un arsenal d’outils bureaucratiques de « contrôle de gestion » se sont développés dans les ministères et les administrations publiques, au détriment des activités et des personnels opérationnels (ceux qui produisent et qui sont en contact avec les usagers et la réalité du terrain). |
Le résultat a été en France un cortège de réformes comme dans l’éducation et dans la santé où l’on a vu la quantité et la qualité des services se dégrader jusqu’à aboutir à des pénuries. Chaque réforme est présentée comme une rationalisation et une modernisation dans l’intérêt des usagers quand le but inavouable et permanent sous-jacent est la fameuse « maîtrise des dépenses » car il ne faut pas que notre taux de prélèvements obligatoires soit trop élevé.
La crise de notre secteur sanitaire et médical
> La crise de notre secteur sanitaire et médical est apparue au grand jour avec la crise de la covid19. Le manque de moyens de nos hôpitaux publics est devenu une évidence partagée par tous et qui fait bien sûr douter de la capacité de nos élus à gérer un service public aussi essentiel que la santé.
Sans évoquer la question invraisemblable de l’absence de stock de sécurité de masques et de gel hydro-alcoolique, la pénurie de personnel et la surcharge horaire des soignants qui en résulte est hallucinante tant et si bien que la crise du covid se traduit par des dépressions et burn-out, des suicides et par des défections massives vers le secteur privé. La revalorisation qui a finalement eu lieu n’est toujours pas à la hauteur des enjeux, surtout pour le personnel infirmier spécialisé.
Chacun est concerné par la pénurie de soins quand il s’agit de prendre un rendez-vous chez un chirurgien-dentiste, un ophtalmologue ou un cardiologue.
De nombreux patients ont subi des reports d’examens et d’interventions du fait de la surcharge de notre système liée au Covid.
La non-vaccination d’un pourcentage élevé de soignants en Ephad et dans les structures de soin a également été un facteur de doute et de perte de confiance dans notre système de santé.
De même le risque de pénurie soudaine de médicaments essentiels (MITM, médicaments d’intérêt thérapeutique majeur) à certains traitements médicaux est un autre symptôme du relâchement des politiques publiques. Comme si nos élus oubliaient pourquoi ils sont en poste et se préoccupaient surtout de leur réélection. Ce sont en effet aujourd’hui les groupes pharmaceutiques qui décident de ce qu’ils vont assurer comme approvisionnements en médicaments, en fonction d’un critère de rentabilité. Des dispositifs ont certes été mis en place par la feuille de route 2019-2022 d’Agnès Buzin, mais ils concernent principalement les moyens de faire face à court terme aux problèmes de pénuries. Or le problème est structurel et ne peut être réglé sans modifier la logique de fonctionnement du marché du secteur pharmaceutique, en France et en Europe.
Un effort budgétaire conséquent s’impose donc en matière sanitaire ainsi qu’une politique industrielle d’encadrement du secteur pharmaceutique. Le vieillissement de la population l’appelle. Sur le sujet de la dépendance sanitaire voir aussi l’article « Surmonter notre dépendance sanitaire » |
La faiblesse de notre secteur de recherche et développement (R&D)
La recherche et développement prépare l’avenir industriel, économique et écologique général d’un pays. Les citoyens mieux formés, en ont parfaitement conscience.
En effet, la R&D a des conséquences essentielles sur le développement économique des pays, en permettant de faire évoluer les appareils productifs et de mettre en œuvre de nouvelles activités génératrices d’emplois et respectueuses de notre environnement.
La recherche et développement rassemble toutes les activités qui partent des laboratoires de recherche pour aller jusqu’à la mise au point de produits nouveaux. Ses impacts sont très importants sur les entreprises qui vont innover grâce à elle à travers des applications économiques des inventions qui se concrétisent dans des produits ou des procédés de fabrication nouveaux.(5)
>La faiblesse de notre secteur de recherche et développement est clairement apparue lors de la crise sanitaire lorsque l’on a constaté que nos instituts de recherche médicale n’étaient plus à la hauteur dans la mise au point rapide d’un vaccin. Les économies ne sont pourtant pas de mise lorsqu’il s’agit de préparer l’avenir avec des nouvelles technologies. Un budget européen de la Recherche digne de ce nom rétablirait sans doute un semblant de confiance lorsque l’on apprend les efforts des pouvoirs publics étasuniens et chinois dans ces domaines.
> Il devient aberrant de former des scientifiques de bon niveau qui vont ensuite s’expatrier aux USA pour bénéficier de conditions de travail et de rémunération meilleures. La DIRD (dépense intérieure en recherche et développement) était de 2,25% en France en 2017, contre 3,02% en Allemagne, 3,28% au japon et 4, 22% en Corée du Sud. La France est à la limite de l’exclusion du top 10, ce qui correspond à un net décrochage depuis les 15 dernières années.
Il faut dire que les salaires des chercheurs français sont ridiculement bas (comme ceux des enseignants) en comparaison de ceux de leurs collègues de l’OCDE et les chercheurs français ont trois fois moins de moyens que leurs collègues pour développer leurs projets de recherche et leurs équipements sont souvent obsolètes (exemple de la faible dotation en cryo-microscopes électroniques ou en sondes atomiques tomographiques) (6)
Il ne faut pas attendre les budgets de l’Union européenne pour financer notre effort de recherche ! Ils ne doivent être considérés que comme du bonus. |
Quand la justice ne passe plus vraiment !
Selon une enquête Harris Interactive réalisée en ligne en mai 2021, 80% des français déclarent que la sécurité est un sujet qui les préoccupe et 73% font confiance à la police mais 49% seulement à la justice. Un projet de loi « pour la confiance dans l’institution judiciaire » a été débattu à l’Assemblée nationale et l’est actuellement au Sénat. Ses dispositions sont loin de suffire pour régler les problèmes rencontrés.
> L’évolution de la réglementation et la surcharge des tribunaux au sens large
Des années d’abandon de la justice par les gouvernements successifs ont conduit à une situation calamiteuse qui a pour résultat que les sanctions sont prononcées avec un grand retard et sont peu exécutées, faute de places en établissements pénitentiaires!
On peut relever dans les évolutions en cours des facteurs aggravants :
– L’évolution de la réglementation pose plusieurs problèmes :
- Les réformes permanentes de la loi génèrent une instabilité de celle-ci qui fait que l’on ne sait plus (hormis les spécialistes) quelles sont les règles qui s’appliquent ! En matière économique cela perturbe souvent le calcul économique des chefs d’entreprise et peut décourager l’activité (On va s’installer ou se développer hors de France pour éviter çà).
- Le manque de moyens de l’Agence Française Anticorruption (AFA) est en cours de résolution par….un démantèlement pur et simple de cette agence dont le rôle semble pourtant indispensable !
- La protection du secret professionnel des avocats serait étendue aux activités de conseil des avocats ce qui va rendre plus difficile la preuve des infractions fiscales et de blanchiment….
– La surcharge de nos tribunaux (greffes, parquet, juridictions) engendre des délais tellement importants que les justiciables « n’y croient plus » et qu’ils finissent par penser que nous sommes entrés dans la loi de la jungle et qu’il est réaliste de ne compter que sur soi pour obtenir justice ou réparation.
D’autant que tout un chacun connaît la saturation de notre système pénitentiaire. Les jugements ne sont souvent pas suivis des effets attendus. De là à descendre dans la rue et à prendre les armes il n’y a qu’un pas. Le mouvement des gilets jaunes s’est aussi nourri de cela : un sentiment d’injustice.
D’autant que la criminalité en cols blancs se développe à bon train, faute de trouver en face d’elle des services de police spécialisés et des juges spécialistes des infractions financières et économiques (fraude aux prestations sociales, escroqueries à la TVA ou aux prêts immobiliers ou à l’installation de panneaux photovoltaïques, ou à la carte bancaire ou à la transaction en ligne, etc..). Une répression efficace permettrait pourtant de faire rentrer dans les caisses de l’État et de la Sécurité sociale des sommes importantes !
Pour conclure, il est prioritaire d’augmenter sensiblement le budget de la justice. Cela a été commencé mais il faut poursuivre pendant des années pour rattraper l’énorme retard ! |
Qui veut encore enseigner ? (7)
Il y a souvent moins de candidats que de places aux concours de recrutement des professeurs et tous les postes ne sont pas forcément pourvus lorsque le niveau est trop bas !
Selon un rapport annuel de l’OCDE publié le 16 septembre 2021, la France rémunère son corps enseignant 15% en dessous de la moyenne de l’ensemble des pays membres et cet écart monte à 20% pour les enseignants expérimentés.
>Notre éducation nationale tourne aujourd’hui à la farce quand on apprend que l’on avoisine les 90% de réussites au baccalauréat. Chacun est devenu conscient que ce diplôme qui devrait ouvrir la porte de la poursuite d’études ne correspond plus qu’à un rituel social. Le développement du contrôle continu comme modalité d’examen va dans le sens d’une dégradation encore plus grande du niveau des élèves. Le nouveau nom de ce ministère devrait être celui de secteur occupationnel et éducatif tant on lui assigne de nombreuses missions d’éducation civique, sexuelle, anti-discriminatoire, environnementale, etc.. qui n’ont plus grand-chose à voir avec un enseignement de base dans les matières nécessaires à la poursuite d’études et la vie de citoyen averti : Français, Mathématiques, Langues étrangères, Histoire et géographie, Sciences, Economie, Sports…
Il n’y a que le ministre qui soit satisfait des évolutions en cours et qui s’en félicite régulièrement dans un exercice d’auto-félicitation devant l’assemblée nationale.
>Désormais chaque élève choisit son menu – à condition que l’établissement d’enseignement le permette tant les budgets sont contraints et les options clairsemées au niveau des départements-. Donc, une réforme « poudre aux yeux » qui génère confusion, hypocrisie et inégalité selon les territoires, tout en réduisant le nombre d’heures d’enseignement ou/et de correction d’examen. Gare à ceux qui ne se préoccupent pas des filières d’enseignement supérieur à choisir dès la fin de seconde.
>« Le niveau n’est plus le même » constatent depuis des années les enseignants du supérieur qui reçoivent les élèves sortant de terminale. C’est normal, puisque les inspecteurs pédagogiques veillent à ce que le bac ne soit pas trop difficile pour ne pas garder les élèves en les faisant redoubler. Le redoublement est en effet depuis longtemps devenu très exceptionnel car il est coûteux. La logique économique l’emporte désormais sur la logique pédagogique ce qui devrait faire réfléchir… Et le « bac par contrôle continu » va aggraver le problème.
Les enseignants « traînent » ainsi dans leurs classes des élèves qui n’ont pas le niveau (faute de motivation ou d’avoir eu le temps nécessaire à leurs apprentissages), et qui alourdissent les cours par un comportement inadapté faute de pouvoir « suivre ». Le niveau d’enseignement en est impacté ainsi que le climat des classes. Mais rien ne doit freiner la mécanique mise en place et dont les nouveaux chefs d’établissements (managers) ont la responsabilité. « Circulez, il n’y a rien à discuter ! » Sinon gare à la notation administrative. On ne sanctionne plus vraiment les élèves indisciplinés (on ne peut plus donner de retenues, ni mettre un élève à la porte de la classe) qui s’en donnent à cœur joie.
Dans ces conditions la seule solution pour les enseignants serait souvent de ne pas respecter le règlement !
>La nouvelle réforme est aussi de permettre aux chefs d’établissement (qui sont de moins en moins souvent d’anciens enseignants) de recruter eux mêmes leur « équipe éducative ». Sur quels critères ? On parle désormais de « culture du management » dans le ministère de l’éducation nationale. Un comble ! Car s’il est bien un domaine qu’il ne faut pas confondre avec celui de l’entreprise, c’est celui de l’enseignement et l’éducation des jeunes. Bientôt peut-être, la notation des enseignants par les élèves sera mise en place et la farce démagogique sera maximale.
Le manque de candidats aux concours de recrutement des enseignants du second degré et du technique est la preuve criante que l’exercice du métier d’enseignant a perdu une grande partie de son sens et aussi que le niveau des rémunérations est très insuffisant. Il a décliné de façon régulière depuis trente ans en niveau de pouvoir d’achat. On parle de « prolétarisation des enseignants ».
Pour faire face au problème, le « ministre autosatisfait » a surtout créé un observatoire de l’évolution du pouvoir d’achat des enseignants alors que chacun peut mesurer la dégringolade de ce pouvoir d’achat. Selon le SNES (syndicat national des enseignants du second degré, la profession subit depuis 2010 un gel du point d’indice et une augmentation de la retenue pour pension qui a généré de 2000 à 2015 une perte équivalente à 2 mois de salaire par an. De sorte que le salaire net mensuel moyen d’un professeur est inférieur de 32,7% à celui d’un cadre du secteur privé !
Pour terminer sur ce sujet, on pourrait souffler aux ministres et inspecteurs de toutes disciplines et de tout poil « Vive la sélection ! » notamment à l’entrée dans les classes. Et chacun y trouvera sa place de façon réaliste. De même, « Vive l’apprentissage » et vive les différentes formules d’alternance (Mais cela est plus consensuel car beaucoup moins coûteux) et aussi « vive les classes de transition » pour corriger les erreurs d’orientation éventuelles. Payer décemment les enseignants n’a rien d’irresponsable si on veut recruter, et a fortiori recruter des personnels de qualité ! Le respect du corps enseignant passe par une rémunération à hauteur de ce qui est alloué au même niveau de formation dans le reste de l’économie, à niveau de formation équivalent |
La connectique peut nous diminuer en nous divisant
> Connectés de force, certains citoyens sont « largués »
L’illectronisme n’est pas une fable et concernerait 16,5% des français. Il a été dans certains cas « révélé » par les confinements et la « mise en ligne » de nombreuses informations et formalités administratives. Ce sont surtout les personnes âgées et les personnes les moins formées.
> La dématérialisation des services administratifs génère un sentiment d’exclusion chez certains
Ainsi certains citoyens se sentent injustement marginalisés. Selon un rapport récent du Conseil d’orientation de l’édition publique et de l’information administrative (Coepia) au moins 20% de la population française se heurte à des difficultés « structurelles » face à la dématérialisation des services publics. (8)
La dématérialisation ne doit jamais être totale et doit toujours laisser la possibilité d’un contact direct « au guichet ». Cela est vrai également dans les entreprises de service privées comme les banques ou les services de transport. |
>Nous sommes victimes des réseaux « web-sociaux» comme les autres pays connectés.
Les réseaux web-sociaux se nourrissent souvent de racontars, bruits de couloir, rumeurs dont certaines plates-formes se sont fait une spécialité. Des trolls (dont certains sont téléguidés par nos amis russes et chinois) alimentent ces réseaux en fausses nouvelles qui se trouvent ainsi amplifiées et viennent déformer la réalité qui n’est parfois perçue qu’à travers ces réseaux, faute d’avoir su former des citoyens avertis et critiques dans notre système éducatif. Ce que l’on désigne souvent par «réseaux sociaux» sont des plates-formes « web-relationelles » qui enferment les adolescents dans des comportements aberrants en leur faisant subir une pression par l’image qui conduit à développer la vanité et la mythomanie. Les futurs citoyens se développent ainsi sans intégrer les dimensions essentielles à la vie en société : réflexion autonome, sens de l’effort, responsabilités liée à la citoyenneté, capacité d’expression directe en face à face, capacité d’initiative etc..
On l’a vu notamment avec le mouvement antivax qui est en soi une aberration dans la mesure où chacun sait que notre population ne vit à l’abri de nombreuses maladies épidémiques que grâce aux vaccins (poliomyélite, tuberculose, variole, coqueluche, etc..).
La diffusion de ces « fake news » entretient un climat de méfiance généralisée.
Les obligations de surveillance des contenus par les différents plate-formes doivent être renforcées et la réglementation pénale concernant internet doit être appliquée. |
En conclusion : La confiance est un paramètre indispensable qui se mérite….
Dans une entreprise, la nécessaire coopération entre les acteurs est largement facilitée par la confiance mutuelle et la confiance dans la direction. Plus la production est complexe et plus l’ajustement mutuel reposant sur la coopération joue un grand rôle. (9)
Au niveau d’un pays comme la France, les relations de citoyenneté peuvent jouer un rôle facilitateur important de la vie sociale et économique. La confiance dans les institutions est un préalable indispensable à la vie démocratique comme à la vie économique et au respect de l’environnement et des équilibres écologiques.
Un pays et ses entreprises peuvent donc redouter la montée de la défiance et il est urgent de remédier aux problèmes posés plus haut, tant au niveau national qu’au niveau européen.
Quant à ceux qui se scandalisent de l’importance de notre taux de prélèvements obligatoires (44,5%) en 2020, il faut simplement leur rappeler que la moitié de ce taux est constitué des cotisations sociales qui sont en fait redistribuées (24,5%) sous forme de prestations, concrétisant sur le plan pécuniaire notre devise nationale de « Liberté, égalité et fraternité ».(10)
>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>
Notes:
(1) On pourrait retrouver le même phénomène dans d’autres pays européens, ce qui donne également à réfléchir.
(2) Le général De Gaulle disait « Il ne faut pas prendre les enfants du bon dieu pour des canards sauvages »
(3) Celui-ci l’a emporté avec 55% de votes « non » et 70% de votants.
(4) Ces évolutions sont contenues dans la fameuse loi LOLF qui a prétendu faire passer la gestion des administrations d’une logique de moyens à une logique de résultats
(5) Concernant l’innovation et la recherche et développement, voir « Les variables d’action stratégique » in chapitre 9 La démarche stratégique p 185 à 192. de l’aide-mémoire Management et économie des entreprises, Ed. SIREY – 2018
(6) Recherche : les raisons du déclin français, David Larousserie, in Le Monde, 29 septembre 2021
(7) Voir aussi l’article sur le rôle des enseignants dans ce blog La caricature contre l’obscurantisme, un outil pour éduquer.
(8) « Trente recommandations pour n’oublier personne dans la transformation numérique des services publics », Conseil d’Orientation de l’Édition publique et de l’Information administrative, janvier 2018
(9) Voir le chapitre 13, Les théories des organisations dans Management et économie des entreprises , G. Bressy et C. Konkuyt Aide mémoire SIREY, 2018
(10) INSEE, Comptes de la Nation, https://www.insee.fr/fr/statistiques /5412401?sommaire=5354786